Introduction
En 2022, une étude indépendante a été menée au sujet de la communication des questions clés de l’audit (QCA). Cette étude, Communicating Key Audit Matters: A Post Implementation Review, se trouve sur les répertoires The Atrium, du Département de gestion de l’Université de Guelph, et YorkSpace, de la School of Administrative Studies de l’Université York.
L’étude visait à mieux comprendre l’expérience canadienne en matière de communication des QCA dans le cas d’entités cotées à la Bourse de Toronto (TSX), ainsi qu’à transmettre des informations pertinentes aux auditeurs et aux autres parties prenantes pour les aider à communiquer les QCA.
Le présent document offre un survol :
- des principales constatations de l’étude;
- des observations et des conseils tirés de l’étude en vue de la prochaine phase de mise en œuvre;
- des indications ne faisant pas autorité qui visent à aider les auditeurs à communiquer les QCA, y compris ceux qui les communiquent pour la première fois.
Avertissement – Bien qu’elle soit financée par le Conseil des normes d’audit et de certification (CNAC), l’étude a été menée de façon indépendante par les chercheurs. Ils sont responsables des constatations, lesquelles ne reflètent pas nécessairement les points de vue du CNAC.
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Sommaire des résultats de l’étude
Les permanents du CNAC ont retenu de l’étude les points qui suivent.
Émergence de pratiques canadiennes distinctives en matière de communication des QCA
Les résultats de l’étude font état de pratiques en matière de communication des QCA qui sont propres au Canada :
- la moyenne de QCA par rapport d’audit (1,55) est plus faible que dans d’autres pays où la communication des QCA est obligatoire (1,7 aux États-Unis1, 2,01 en Australie2, à 3,27 au Royaume-Uni3);
- le résultat des procédures d’audit qui ont été mises en œuvre n’est généralement pas inclus dans la communication des QCA.
Les données recueillies lors des entretiens donnent à penser que le contexte juridique et réglementaire canadien a une forte influence sur les pratiques de communication de l’information au Canada; les auditeurs se sont dits réticents à aller au-delà des exigences des normes d’audit en raison d’un éventuel risque juridique. Il en résulte des QCA rigoureuses, mais réduites à leur plus simple expression. Bon nombre des auditeurs interrogés ont également dit appliquer les pratiques utilisées par leurs homologues américains pour les questions critiques de l’audit.
Moins de 5 % des rapports ne contenaient aucune QCA. La plupart des personnes interrogées ont signalé être mal à l’aise à l’idée de ne communiquer aucune QCA; il en découle de nombreuses consultations dans l’ensemble du cabinet. Les auditeurs sont tout de même conscients des inconvénients qu’entraîne la communication d’une QCA dans l’unique but de ne pas délivrer un rapport qui n’en contient aucune.
Circonstances propres à l’entité et QCA récurrentes : la question de la personnalisation des QCA
Dans l’ensemble, l’analyse textuelle des QCA communiquées indique que les auditeurs canadiens adaptent leur description des QCA et leurs réponses en fonction des circonstances propres à l’entité auditée. Par contre, pour ce qui est des « QCA récurrentes », soit les QCA communiquées pour une même entité relativement à la même question au cours d’années consécutives, le libellé est beaucoup moins diversifié. Dans la plupart des cas, il varie peu, voire aucunement, car la situation qui a donné lieu à la communication initiale de la QCA persiste. Cette atrophie qui favorise le recours à des énoncés standards est une conséquence inévitable et logique, et la communication des QCA pourrait devenir moins utile au fil du temps. Les cabinets d’audit sont toutefois conscients du risque de parti pris lié à la complaisance ou à la familiarité, et ils s’assurent que le processus de revue remet en question les conclusions de l’associé responsable de la mission.
Mise en œuvre de la communication des QCA pour 2020 : une planification et une exécution réussies
Les données recueillies lors des entretiens indiquent que les investissements des cabinets d’audit dans la formation et le soutien pour préparer la mise en œuvre de la communication des QCA ont porté fruit. Cette mise en œuvre s’est généralement déroulée selon les attentes : les auditeurs, les préparateurs et les membres de comités d’audit n’ont rapporté aucune surprise et ont signalé peu d’aspects sensibles.
Avantages limités des QCA
Parmi les groupes de parties prenantes clés (auditeurs, préparateurs d’états financiers, membres de comités d’audit et utilisateurs avertis des états financiers), la plupart des personnes interrogées ne trouvent pas que les QCA sont utiles. Les données recueillies lors des entretiens avec les utilisateurs avertis (analystes côté vente et côté achat, autorité de réglementation, analyste de crédit) indiquent que ceux-ci ont une connaissance limitée des modifications apportées au rapport de l’auditeur, y compris de l’existence des QCA. De plus, après avoir passé en revue les exemples de QCA, les utilisateurs ont mentionné qu’il était peu probable qu’ils s’appuient sur les informations ainsi fournies, surtout si le résultat des procédures d’audit mises en œuvre n’est pas inclus dans la communication des QCA. Le foisonnement des informations disponibles et la nécessité de comprendre l’état des perspectives de chaque entité font en sorte que, du point de vue des utilisateurs avertis, les QCA ne sont pas d’actualité et ne les renseignent pas suffisamment sur l’entreprise ou le modèle d’affaires.
Néanmoins, les données recueillies lors des entretiens avec les auditeurs et les préparateurs font état de certains avantages liés à la communication des QCA, par exemple :
- certains auditeurs responsables de la gestion de la qualité de la mission ont observé des améliorations quant aux informations fournies par voie de notes, sans doute en raison de l’amélioration des communications entre les auditeurs et la direction pour assurer l’uniformité entre ces informations et les QCA correspondantes;
- certains préparateurs, en particulier ceux qui proviennent d’organisations dont la structure de gouvernance et le système de contrôle interne sont de moins grande ampleur, ont indiqué que la communication des QCA leur avait donné l’occasion de proposer des améliorations visant à corriger les faiblesses des processus d’affaires.
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Observations et conseils en vue de la prochaine phase de mise en œuvre
Étant donné que la communication des QCA a été mise en œuvre depuis plus d’un an en ce qui concerne les entités cotées à la TSX et qu’elle s’étendra en 2022 aux entités non cotées à la TSX, il est maintenant temps pour les auditeurs de se pencher sur les leçons tirées de l’expérience vécue au Canada en 2020. L’étude à ce sujet présentait des observations et des conseils fondés sur l’expérience des personnes interrogées et d’autres constatations, notamment celles énoncées ci-après.
- Commencer tôt à préparer les parties intéressées à la mise en œuvre des QCA – Il pourrait notamment falloir préciser les rôles des auditeurs, des préparateurs d’états financiers et des membres du comité d’audit en ce qui concerne la communication des QCA.
- Mettre en œuvre des tests de terrain pour la communication des QCA – Il peut s’agir, par exemple, de cerner les secteurs de risque potentiels et les QCA qui pourraient être communiquées et d’en discuter avec les parties intéressées.
- Se préparer à devoir consacrer beaucoup de temps aux QCA au cours de la première année de la mise en œuvre – Il pourrait notamment s’avérer nécessaire de prévoir du temps pour la rédaction et l’amélioration des descriptions des QCA, et prévoir suffisamment de temps pour une revue.
- Faire valoir les avantages des QCA aux clients et au personnel d’audit – Les avantages peuvent comprendre l’amélioration des informations fournies dans les états financiers et des processus opérationnels.
- Importance de la communication des QCA au cours de la première année – Sachez qu’il peut y avoir des attentes implicites pour le premier cycle de communication des QCA, notamment quant au nombre et au type de QCA.
- Rédiger des descriptions efficaces des QCA – Il faut notamment éviter les phrases longues ou conditionnelles, utiliser des guides de rédaction et demander à d’autres auditeurs de faire un contrôle qualité des descriptions.
- S’attendre à des expériences plus faciles au cours des années à venir – Les constatations donnent à penser que la communication des QCA a pris moins de temps et que les auditeurs, les préparateurs et les membres du comité d’audit ont été plus à l’aise avec le processus dans les années subséquentes.
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Indications utiles
En 2021, les permanents du CNAC ont élaboré une série d’indications ne faisant pas autorité pour aider les auditeurs, les préparateurs d’états financiers et les comités d’audit à mettre en œuvre les exigences en matière de communication des QCA. Les observations et les conseils identifiés par les chercheurs reprennent des messages et les indications clés de ces ressources.
- Questions clés de l’audit : Foire aux questions à l’intention des parties prenantes – Cette foire aux questions est destinée aux membres de comités d’audit, à la direction et aux autres utilisateurs d’états financiers. Elle peut être utile aux auditeurs qui cherchent à aider les parties intéressées à se préparer à la communication des QCA.
- Audits d’entités cotées à la Bourse de Toronto et communication des questions clés de l’audit : Leçons tirées des tests de terrain – Feuille de route pour l’élaboration d’un processus efficace d’application des exigences liées aux questions clés de l’audit – Ce guide vise à aider les cabinets d’audit à mettre en œuvre les exigences liées à la communication des QCA, et traite des points à prendre à compte relativement aux tests de terrain.
- Audits d’entités cotées à la Bourse de Toronto et communication des questions clés de l’audit : Leçons tirées des tests de terrain – Détermination et communication des questions clés de l’audit dans le rapport de l’auditeur – Ce guide présente des points à prendre en considération aux fins de la détermination et de la communication des QCA. Il peut se révéler utile pour les auditeurs qui exécutent un test de terrain, mettent en œuvre la communication des QCA pour la première fois ou envisagent la communication continue des QCA.
CPA Canada a également publié les ressources suivantes :
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Conclusion
Selon le Conseil des normes internationales d’audit et d’assurance (International Auditing and Assurance Standards Board – IAASB), la communication des QCA a été mise sur pied dans le but de répondre à la demande des utilisateurs pour des informations supplémentaires sur les questions importantes traitées dans le cadre de l’audit; il s’agira souvent d’informations liées à des aspects des états financiers à l’égard desquels la direction et l’auditeur ont dû porter des jugements importants4.
Selon l’étude, la communication des QCA n’a pas encore atteint son objectif au Canada. Toutefois, la mise en œuvre au Canada en est encore à ses débuts; elle n’a toujours pas eu lieu pour les audits d’entités cotées à une bourse autre que celle de Toronto, et les utilisateurs n’ont eu que deux ans pour se familiariser avec la communication des QCA. En outre, la communication des QCA pourrait être bonifiée par des faits nouveaux en matière de normalisation. Par exemple, les analystes interrogés dans le cadre de l’étude ont indiqué que les QCA, tout comme les états financiers, traitent d’« informations anciennes » et ne répondent généralement pas à leurs besoins. Le passage à l’information intégrée et, qui plus est, la communication d’informations prospectives pourraient avoir une incidence sur l’utilité de la communication des QCA.
L’étude constituait une étape importante de l’évaluation continue des normes par le CNAC. Il fera un suivi de l’expérience en matière de communication des QCA au Canada à mesure qu’elle gagnera en ampleur et en maturité. De plus, le CNAC poursuivra ses efforts en vue d’élaborer des normes de grande qualité qui répondent aux besoins des parties prenantes.
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Méthodologie de l’étude
Au premier trimestre de 2022, les permanents du CNAC ont commandé une étude sur la mise en œuvre des exigences de communication des QCA au Canada pour les entités cotées à la TSX dont l’exercice se termine à compter du 15 décembre 2020.
Joanne Jones, professeure agrégée à la School of Administrative Studies de l’Université York, et Sandra Scott, professeure agrégée à la Gordon S. Lang School of Business and Economics de l’Université de Guelph, ont réalisé cette étude, qui consistait :
- à analyser 618 rapports d’audit contenant de 0 à 6 QCA, pour un total de 895 QCA;
- mener des entretiens auprès de 38 parties prenantes, y compris des auditeurs, des membres de comités d’audit, des préparateurs et des utilisateurs avertis.
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Références
- Public Company Accounting Oversight Board, Interim Analysis Report: Evidence on the Initial Impact of Critical Audit Matter Requirements, document no 2020-002, le 29 octobre 2020, page 4.
- M. Kend et L. Nguyen, Investigating recent audit reform in the Australian context: An analysis of the KAM disclosures in audit reports 2017-2018, International Journal of Auditing 24(3) (2020), pages 412-430.
- E. Deneuve, A. Filip et A. Jeny, Client-specific information in Key Audit Matters and audit risk, document de travail (2022).
- IAASB, Auditor Reporting – Key Audit Matters, International Federation of Accountants, New York, le 30 janvier 2015, n. p.
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